revue Europe Littérature & peinture et Elfriede Jelinek

(n°933-934, janvier-février 2007)
Les rapports entre littérature et peinture ne cessent de soulever
un foisonnement d’interrogations. Et sans doute n’aura-t-on jamais fini
d’éclairer la diversité des liaisons qui s’opèrent à l’horizon de ces deux arts. C’est un fait que l’histoire de la peinture en Occident s’est largement construite en rapport avec la littérature. L’écriture même n’échappe pas à un traitement pictural : des inscriptions placées dans les fonds des tableaux, au Moyen Âge comme à la Renaissance, jusqu’aux graphismes parfois sauvages (Basquiat) ou savamment contrôlés (Pierre Alechinsky) de peintres contemporains, la lettre écrite, inscrite sur le tableau, devient aliment de la création plastique.
Non pour confondre littérature et peinture, mais bien plutôt pour aviver leurs différences en faisant valoir leurs séductions réciproques.
Du côté de la littérature, la perspective qu’offre la peinture est non seulement pour les écrivains un puissant aliment créateur, mais aussi un stimulant théorique particulièrement fécond. Les textes réunis dans ce dossier d’Europe permettent de nourrir une réflexion aux multiples facettes. On pourra, chemin faisant, mesurer combien les perspectives changent d’une époque à l’autre : de la pratique médiévale de l’enluminure à la fascination picturale des écrivains du XVIIIe siècle, puis du Romantisme à la période contemporaine,l’horizon se déplace, et les liaisons entre littérature et peinture se transforment. On verra aussi à quel point cette réflexion sollicite tous les paramètres de la pratique littéraire : données historiques, questions esthétiques, pratiques d’écriture, enjeux personnels ou collectifs se croisent et se modifient comme en autant d’anamorphoses.
Daniel Bergez, Yves Bonnefoy, Jean-Pierre Richard, Michel Stanesco,
Gisèle Mathieu-Castellani, Bernard Roukhomovsky, Didier Masseau, Pierre Wat,
Judith Labarthe, Luc Fraisse, Serge Linarès, Brigitte Ferrato-Combe,
Anne-Marie Christin, Marianne Simon-Oikawa, Nadeije Laneyrie-Dagen,
Gao Xingjian, Yves Peyré, Claude Esteban, Giorgio Caproni, David Middleton.
Elfriede Jelinek
Si un parfum de scandale s’attache à l’œuvre d’Elfriede Jelinek (Prix Nobel de Littérature 2004), sa force et son originalité l’ont imposée au premier plan de la littérature contemporaine de langue allemande. Les rapports entre les sexes, le passé de l’Autriche, l’amnésie partielle dont souffre le pays, les formes d’asservissement et les mécanismes d’oppression sont autant de domaines qu’elle explore sans concession. Non sans dévoiler ce qui s’immisce dans le langage, non sans faire entendre les voix qui parlent avec nouslorsque nous parlons.
Yasmin Hoffmann, Klaus Zeyringer, Bernard Banoun, Benoît Legemble, Annette Runte,
Françoise Rétif, Dieter Hornig, Pia Janke, Bérangère Bonvoisin, Barbara Heigl,
Christa Schoofs, Bettina Brandt, Claire de Oliveira, Olivier Le Lay, Elfriede Jelinek.
Poème
de l’instant
La colline que nous gravissons
Mais soudain, l’aube nous appartient.
Sans savoir à quoi cela tient, nous agissons.
Sans savoir à quoi cela tient, nous avons
tenu bon,
Témoins d’une nation non pas brisée,
mais simplement inachevée.