Unes
Fonds : Jean-Pierre Sintive.
1er février 2022
Aux Aresquiers
Les 34 poèmes des Aresquiers nous parviennent comme une lettre effilochée dans le vent. Un murmure fragmentaire, roulé dans le ressac ; les derniers mots adressés à la mère défunte et tout ce qui s’efface, sauf la mémoire. Tout ce qui s’accepte aussi, malgré l’espace vide de la perte, face au soir, aux vagues lancinantes : « tu ne reviendras pas ». La maison, le jardin, le ponton, la mer, le phare, quelques éclats suspendus et indéfinis dans le soir, on n’en saura pas plus, le lieu préserve non pas son (…)
1er janvier 2022
Mihubi
la nuit pleine
la chambre
le hangar
la route
le verger
le mur
Nous traversons ici deux paysages, un bord de mer, ses vagues, sa plage, ses nuits, et Mihubi, une montagne où s’accrochent quelques maisons, des sentiers et des torrents, des murs effondrés, des moutons. Le monde semble cerné de brumes, d’obscurité, et une voix nous parle à travers l’épaisseur d’un rêve. Rêve murmuré par une langue souple, qui passe entre les vagues, les buissons, les racines, les bêtes.
Une langue qui tisse ses (…)
19 novembre 2021
Je cherche l’obscurité
Cette édition regroupe un choix parmi les poèmes écrits par Emily Dickinson au lendemain de la guerre de Sécession. Si les 5 années de la guerre ont coïncidé avec la période la plus intense de son activité poétique (937 poèmes entre 1861 et 1865), les cinq années qui suivent marquent un grand silence : 72 poèmes seulement de 1866 à 1870. Une forme de repli, et une intensité confiée à l’infime. Une lutte même, secrète, sous-jacente, contre « le givre de la mort », contre le malheur et la séparation. C’est le (…)
8 octobre 2021
Opium à bord
Avant l’opium mon âme était déjà malade. Ressentir la vie, c’est convalescence et anémie Et je vais chercher dans l’opium qui console Un Orient à l’orient de l’Orient.
La vie à bord va finir par me tuer. Journées de fièvre dans ma tête Et, même si je cherche à m’en rendre malade, Je ne trouve plus de ressort pour m’adapter.
Incompétent astral et en plein paradoxe Je vis ma vie par plis mordorés, Onde où le point d’honneur est au creux Et les plaisirs mêmes sont ganglions de mon mal.
Alvaro de Campos est (…)
10 septembre 2021
Écrits de la bête noire
Édition de Billy Dranty.
Ces trois textes inédits de René Daumal ont paru respectivement dans les troisième, quatrième, puis huitième (et ultime) livraisons d’un éphémère mensuel de 8 pages nommé La Bête noire (1935-1936), imaginé par Marcel Moré, Roger Vitrac, Michel Leiris, Raymond Queneau et Jacques Baron, et qui a compté Antonin Artaud ou encore Le Corbusier parmi ses contributeurs. La revue, à peine née, est l’objet de vives tensions entre plusieurs grandes figures du milieu littéraire, et cristallise (…)
1er septembre 2021
L’Absent
Ce livre est le récit d’une d’une disparition. Celle d’Ali Boulfra en 1958, et la quête plus d’un demi-siècle plus tard de sa fille, née cette même année. C’est cette absence que creuse Erwann Rougé, à travers les époques et les territoires : de la Kabylie à Rennes. Quête de fragments d’une existence, à travers des gestes simples, des paysages nets et durs, des souvenirs de guerre, pour tenter de percer l’énigme d’une vie inconnue.
Il y a une rétractation de la lumière, de la terre et du silence qui passe (…)
20 août 2021
Essart
Traduit de l’espagnol (Chili) et préfacé par Irène Gayraud
Quelle est cette terre que Gabriela Mistral cherche à essarter, à défricher ? Celle de son Chili natal, de la Cordillère des Andes, des légendes Mayas ? Ou la terre des exils et des ombres ? Essart est un livre mystérieux ; on lit ces poèmes comme on marche sur une terre ouverte, dont on embrasse les sommets du regard, cheminant au plus près d’une parole dense et profonde, rustique et mystique. Gabriela Mistral hisse ses poèmes vers la fable, (…)
10 juin 2021
Le Printemps et le reste
Traduction nouvelle, préface et notes de Valérie Rouzeau
Au début des années 1920, le monde se remet d’une guerre mondiale sanglante et d’une pandémie grippale encore plus meurtrière. Les milieux artistiques d’Europe et d’Amérique bouillonnent de créativité, explorent de nouvelles voies, discutent, échangent : les idées et les formes traversent régulièrement l’Atlantique. En 1922, Yeats obtient le Prix Nobel et Rilke publie les Élegies de Duino : la poésie d’avant-guerre se porte bien. Mais c’est aussi (…)
19 mars 2021
À la source du vivre et du voir
Plus qu’une autobiographie, ce livre central dans l’œuvre de Charles Reznikoff est un art poétique. Il y a là une forme de résurgence, ou de permanence de la vie naturelle, une capacité d’émerveillement intacte quoique jamais naïve, presque une innocence dans le regard posé sur la ville. Reznikoff arpente les rues de New York avec le passé en écho, en observateur de cette civilisation nouvelle, effervescente, bâtie sur le souvenir ou le mythe lointain des légendes disparues : aussi bien grecques (…)
Poème
de l’instant
Lied vom Kindsein
Als das Kind Kind war,
ging es mit hängenden Armen,
wollte der Bach sei ein Fluß,
der Fluß sei ein Strom,
und diese Pfütze das Meer.
Als das Kind Kind war,
wußte es nicht, daß es Kind war,
alles war ihm beseelt,
und alle Seelen waren eins.