Les animaux industrieux
Auteur : Jean-Paul Auxeméry
A l’inverse de deux volumes qui réunissaient son oeuvre antérieure - et qui offraient un savant mélange, une chambre d’échos de séquences aux registres variés - Les animaux industrieux se présentent presque comme un poème d’un seul tenant, déroulant une série de variations d’une indéniable unité. Aussi bien a-t-on moins affaire ici à des poèmes isolés qu’aux fragments qui s’enchaînent (et serépondent) d’un long texte perdu dont il ne resterait aujourd’hui que ses éclats : la forme retenue - blocs de strophes et vers isolés impeccablement déposés sur la page - en conserve l’incandescence première tout en exhibant ses lacunes. La méditation (car c’en est une) concerne le destin d’une vie et d’un monde qui se délitent de concert. Passée au filtre du réel, la parole poétique excède pourtant le destin d’un seul : l’histoire d’une humanité sans âge s’y profile, jusque dans sa gloire sauvage et ses rêves échoués. Vision empreinte d’un pessimisme lucide - mais attentive à ce qu’il reste de beauté dans le désastre du monde. Comme dans ce chant d’amour étranglé.
Poème
de l’instant
Enracinées
en sortant de l’hôpital
briques début de siècle
nuages lointains et parme
bitume encore humide
le vert du jardin du Luxembourg
m’a brûlé les yeux
Enracinées
L’Iconopop / 2023