Femme noire
Femme nue, femme noire
Vêtue de ta couleur qui est vie,
de ta forme qui est beauté !
J’ai grandi à ton ombre ;
la douceur de tes mains bandait mes yeux.
Et voilà qu’au cœur de l’Été et de Midi,
je te découvre, Terre promise,
du haut d’un haut col calciné
Et ta beauté me foudroie en plein cœur,
comme l’éclair d’un aigle.
Léopold Sédar Senghor, 1906-2001, « Femme noire », Chants d’ombre, Éditions Points, 2021.
Poème
de l’instant
L’amour qui n’est pas un mot
Ma vie en vérité commence
Le jour que je t’ai rencontrée
Toi dont les bras ont su barrer
Sa route atroce à ma démence
Et qui m’as montré la contrée
Que la bonté seule ensemence
Tu vins au cœur du désarroi
Pour chasser les mauvaises fièvres
Et j’ai flambé comme un genièvre
À la Noël entre tes doigts
Je suis né vraiment de ta lèvre
Ma vie est à partir de toi
Louis Aragon, « L’amour qui n’est pas un mot », Le roman inachevé, Éditions Gallimard.