Le cri des femmes afghanes
Anthologie établie et traduite par Leili Anvar

Préface : Atiq Rahimi
Le mot de l’éditeur :
Il existe « un cri du silence » comme il existe des silhouettes sans visage et des visages sans voix. En Afghanistan, depuis longtemps déjà, l’oiseau noir de la peur paraît s’être juché sur l’épaule des femmes. Du monde libre qui est le nôtre, nous les imaginons invisibles et muettes sous la burqa, condamnées à la misogynie aveugle, recluses dans le poing d’une domination archaïque. Pourtant en Afghanistan, comme ici, des femmes lisent et écrivent. Des vers. Des chants. De la poésie. Des mots qui ouvrent en elles, et autour d’elles, un espace de liberté où ce qui est interdit, tabou, bafoué, vient sourdre comme une source à la surface de la terre. Les langues se délient. Les corps parlent. L’âme trouve une voix. Et l’eau de leurs poèmes irrigue le monde d’une espérance que l’on n’attendait plus. Oui, le courage des femmes dévoile ici son vrai visage.
Extrait :
« La nuit, les étoilesBrûlent de douleur avec nousLa nuit, les nuagesPleurent de chagrin avec nousLa nuit, les feuillesTremblent de peur avec nousLa nuit, les ventsSoufflent de rage avec nousEt nous, dans les ténèbres de ces nuitsDébordant de cris sans voixAvec la torche de nos prièresC’est l’aube que nous attendons… »
– Parvin Pejvâk
Paru le 20 mai 2022
Éditeur : Éditions Bruno Doucey
Poème
de l’instant
33 poèmes en forme de nouvelles (ou l’inverse)
Il arrive fréquemment que les hommes aient peur des chevaux. Certains jouent les indifférents, d’autres ne cachent pas leur inquiétude. Pégase, le cheval divin, avait des ailes d’ange à faire peur. Incitatus avait une écurie de marbre, une mangeoire en ivoire, à faire peur. Sur la tombe de son cheval, Alexandre fonda la ville de Bucéphalie et provoqua peur et questionnement. Mais là, là, dans ce champ jaune, il s’agit de retourner les terres les plus empierrées, car tout le monde ne possède pas encore son Massey Ferguson. Auquel on ne prête ni ailes ni ombres.