Jean-Baptiste Cabaud

Jean-Baptiste Cabaud est né en 1970 en Savoie, et vit à Lyon depuis 1993. Après une dizaine d’années passées dans le graphisme, il se consacre depuis 2005 entièrement à la poésie, écrite, parlée, dessinée. Il a publié depuis cette date un livre jeunesse et plusieurs recueils de poésie.
De ses textes, il donne lectures et performances régulières en France et à l’étranger (Berlin, Lituanie, Slovénie, Roumanie…) en voix seule ou au sein de la formation de poésie-électro Saint Octobre qu’il a monté avec le musicien David Champey.
Son travail de dessin, tournant actuellement autour d’auteurs et de textes croisant poésie, astrophysique et philosophie (Auguste Blanqui, Lucrèce…) est donné à voir en expositions (Lituanie, France…)
Il aime aussi croiser les pratiques et confronte souvent sa poésie avec les disciplines d’autres artistes : Magali Mélin, peinture, les Derviches Associés, cinéma, Sarah Pellerin-Ott, danse, Maud Chalmel ou Clément Payot, graphisme, Anne Bouillot, photographie…
Jean-Baptiste anime tout au long de l’année rencontres et ateliers d’écriture poétique en milieux scolaires, centres sociaux, bibliothèques, auprès d’enfants, d’adultes ou de publics en difficulté (handicap, etc.), que ce soit en France ou à l’étranger.
Extrait
Mère Ourse
dans la gueule de la mère ourse, un morceau de monde comme une viande rouge dont elle ne sait se défaire. des tempêtes couronnes, des refuges à orage, des forêts avalanches. du courage. dans sa gueule chaque matin, la météo du jour et les retournements d’un ciel à bascule. deux contrepoids, contre-mesures, jour de traque ou de repos, ses yeux regardent ailleurs, encore ailleurs. ou là. elle grogne et rumine. s’ébroue, sort, trace son sentier. hauteurs de monde, montagnes. invasions de ciels, de ruisseaux, de boue. du sédiment. beaucoup de beauté mélangée. et le reste. et le reste. pas le choix.
dans la gueule de la mère ourse, un labyrinthe chaviré, des évacuations d’air, une tenue d’ouvrier. grottes à maçonner, plaques en verre à monter. chantier. protéger ses espaces des chutes de soleils mensongers. pluies d’aérolithes en feu, pylônes fumée, nuées ardentes. pour contrer, tout le jour elle s’active, dans son œil la distance, à la patte une truelle, dans le ventre un horla. dans le ventre un horla. pas le choix.
dans la gueule de la mère ourse, la gueule d’un poète aux rêves infatigables — elle stoppe, pourtant, oui. elle s’arrête, quelques fois, oui. elle lève le museau dans les rayons rasants. plisse les yeux. frissonne à l’étrange instant planant dans la chaleur glissante, je l’ai vu. aube. crépuscule. elle change de regard, oui. surprise se relâche, oui. elle laisse. laisserait. presque, parmi ces ombres qui s’étirent, le temps s’étendre, mais… — mais dehors il pleut du feu et pas le choix, vivre, encore, c’est se protéger. oui. vivre, encore, c’est se protéger.
Jean-Baptiste Cabaud
in Demain de nuits de jours,
éditions Gros Textes, 2014
Bibliographie
Poésie
Jeunesse
En revues et collectifs