HAPPENING
Les portes du théâtre viennent de se refermer. Salle comble. Le rideau se lève.
Un lit à baldaquin occupe toute la scène. Enfouis sous les couvertures, Oscar et sa femme. Un temps assez long. Oscar, subrepticement, sort du lit ; il se laisse glisser sur le sol, enfile ses pantoufles, resserre les cordons de son pyjama. Sa femme qui n’est pas dupe de son manège se dresse brusquement, et d’une voix de crécelle :
Où vas-tu, Oscar ?
M’asseoir avec les spectateurs.
T’asseoir avec les spectateurs !
J’en ai assez de ta peau, tu comprends ? Assez de ta peau.
J’en changerai, mon amour, ne me quitte pas, j’en changerai.
OSCAR, entre ses dents. – Facile à dire !
Je t’en supplie ; après toutes ces années passées côte à côte, tous ces couchers de soleil contemplés ensemble… Oscar, pour l’amour de notre amour…
Oscar ne veut pas l’entendre. Il s’avance sur la scène, s’apprête à gagner la salle. Voici que des coulisses surgit un homme d’une cinquantaine d’années, chauve, exaspéré : c’est le Directeur du théâtre.
LE DIRECTEUR. – Qu’est-ce que c’est que ce bordel ?… Rien à voir avec la pièce, ce que tu fais là.
OSCAR. – Rien.
LE DIRECTEUR. - Tu te fous de ma gueule, non ?
OSCAR. – Oui.
Le Directeur, plus chauve que jamais, sort alors un revolver de sa poche et tire trois coups de feu sur Oscar. Blessé à mort, celui-ci tombe à jamais dans le trou du souffleur. Sa femme retape son oreiller, s’assied confortablement, et avec jubilation :
Pas trop tôt…Quel mufle !
Les spectateurs vocifèrent.
RIDEAU
René de OBALDIA
Poème inédit
Poème
de l’instant
Brefs Déluges
C’est drôle ce qu’on arrive à faire
Avec un cintre
On peut le déplier, le tordre
En un petit cygne qui vogue sur l’eau