Exercices de rêverie de Gérard Farasse

Fin avril, le rosier se décide : il ôte les mains de ses poches. Elles sont collées directement à la tige : il n’a pas de bras. On dirait quelqu’un qui retirerait difficilement un pull-over et qui n’arriverait qu’à en sortir les mains, l’une, puis l’autre.
Il ouvre ses pinces de crabe. On les devine coupantes, prêtes à saisir et à cisailler. Ce sont des prothèses.
Il fait songer à un infirme, à un manchot.
Son côté larvaire émeut.
Ensuite, évidemment, il triomphe : comme mes roses sont magnifiques ! On le lui a trop répété. Il prend des poses. Il est content de lui.
Alors on souhaite qu’une tempête vienne le remuer en profondeur et rabattre de sa superbe.

Chacune des fantaisies d’Exercices de rêverie trouve son origine dans une sensation, une image, un souvenir.
Ces vignettes, très légèrement rehaussées, résultent d’un dosage instable : la réserve y tempère l’émotion, la mélancolie y hante l’enjouement, et la banalité s’y métamorphose en bizarrerie.
Gérard Farasse vient de faire paraître Belles de Cadix et d’ailleurs (Le Temps qu’il fait). Il est également l’auteur d’essais critiques : L’âne musicien, Sur Francis Ponge (Gallimard), Amour de lecteur (Presses du Septentrion).

Paru le 29 novembre 2004

Éditeur : L’Improviste

Genre de la parution : Recueil

Poème
de l’instant

Emmanuel Laugier

De terre, de mer, d’amour et de feu

J’ai embrassé Port-au-Prince
Comme on embrasse un premier amour

Une première fois
Un premier soir de saison des pluies

Marc Alexandre Oho Bambe, De terre, de mer, d’amour et de feu, Mémoire d’encrier, 2017.