Douleur que j’ai aimée, dis-je…

Franck Venaille

Douleur que j’ai aimée, dis-je, « aimée » est-ce le mot
Qu’alors j’employai devant tous ces visages de mauvais
Lieux ? Douleur ! Cette manière de nous mouvoir au
Milieu de la foule dolorante. Lui ! Que fait-il, voûté ? Il
Essaie, oui peut-être essaie-t-il de faire entrer toute cette
Souffrance dans ces sacs de deuil noir, des mouvements
Du glas, de larmes. Reviennent à lui ces mots : « douleur
Aimée » & se souvient de chacun des termes de cette
Lettre qu’au grand jamais il n’écrira : « D’amour ah ! je
Me suis pour vous, blessé ». Pourquoi & quand ? Désormais
Quelle armée lui tient compagnie ? Quel officier la veille ?
Douleur aimée, pourquoi geindre ? Vous vous éveillez
Près d’eux, ces hommes sortant du bal, dites ! en sang.

Franck Venaille

Poème
de l’instant

L’Angelus Des Sentes

Je me suis dérobé pour un temps, aux goguenardes clameurs humaines. Heureux de vivre dans le pur enchantement des rossignols et des brises, j’ai gagné la cabane aux murs blancs, au toit de chaume jauni, bâtie ainsi qu’un nid lumineux, au-dessus des torrents.

Michel Abadie, 1866-1922, L’Angelus Des Sentes, 1901.